"Tante Mame est la charmante dingue que l'on voudrait dans la famille" (1)

Le bandeau commercial du livre de Patrick Dennis , Tante Mame, assure que tout le monde aimerait avoir un tel personnage au sein de sa propre famille. Si vous posiez cette question à votre père, dont l'une des soeurs est à peu près aussi loufoque que l'héroîne du dit bouquin, pas sûr qu'il soit du même avis... Parce qu'une tante Mame c'est rigolo mais c'est surtout fatiguant, ingérable et complètement imprévisible ! Et la fantaisie n'est pas toujours comprise... surtout lorsqu'elle n'est pas de rigueur.

Faire le tri dans toutes les facéties de la votre n'est pas chose aisée. Si se retrouver dans des situations improbables est son quotidien, elle sait également se faire remarquer par ses tenues vestimentaires. Non pas que celles-ci soient plus olé-olé que celles de tout à chacun mais disons qu'elle a l'art et la manière de choisir de porter des pièces complètement inappropriées au lieu dans lequel elle se trouve. C'est comme ça, qu'en milieu d'une matinée, vous l'aviez retrouvée au milieu de ses pieds de tomate, en pantoufles, les cheveux remontés en chignon façon Farmer (dont elle partage également la couleur) et habillée d'un espèce de kimono en soie noir tout fleuri de grandes pivoines plus rouges les unes que les autres. Ce n'est pas comme si son potager de ville donnait côté cours... Une autre fois, le chignon s'était vu rehaussé de charmants gros papillons nacrés bleus assortis à la couleur d'une robe longue digne d'une cérémonie de mariage. Alors qu'elle s'était pointée à l'heure du Ricard, votre père posa LA question qui semblait le titiller depuis son arrivée :
Votre père prêt à tout entendre : T'arrives d'où pour être habillée de la sorte ?
Votre tante sur le ton de l'évidence : Bah ! De faire mon marché !

... Grand moment de solitude paternel ...

Pourtant, la cerise sur le gâteau remonte peut-être au jour de l'enterrement de votre bien-aimée grand-mère. En ce jour de deuil, elle n'avait pas voulu rompre la tradition en suivant le dress code à la lettre : se revêtir de noir de la tête aux pieds. Sa seule interrogation résidait dans le choix de sa mantille : en crêpe de voile ou en dentelle ? Votre mère, ne sachant pas si elle devait rire ou s'énerver, a tout de même trouvé la force de lui faire remarquer calmement que le port de ce genre d'attribut a disparu de notre territoire depuis belle lurette. Et ce, même dans ce petit village de Bretagne profonde, fief familial. Soit. Elle fourra ses deux voiles de deuil dans son sac et les tronqua contre une paire de lunettes noires. Des Ray-Ban. Parfaitement raccord avec sa jupe en cuir et son Perfecto... A 46 ballets, toujours rock n'roll la tante ! Si votre père ne s'est pas étranglé tout de suite en apercevant sa soeur déguisée de la sorte, il n'y manqua pas lorsque son mec du moment lui fourra une bouteille de bordeaux dans les mains, qu'il voulait goûter séance tenante, histoire de fêter l'évènement...

En y repensant, il vous semble que c'est ce dernier point qui vous a réellement fait tilter qu'elle n'est pas tout à fait câblée comme tout le monde... Et que le tonton de l'époque non plus d'ailleurs !

(1) : commentaire publicitaire de Charles Dantzig

                

Italie, Rome (collection printemps 2011) - EU, New York (collection automne 2009)
Maroc, Fès (collection automne 2011) - Liban, Tyr (collection automne 2008)