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Fleurs de marais
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22 juillet 2012

Au fil de l'eau

Demain vers 9h00 ? vous rappelait hier soir votre voisin. Car demain, vous avez rendez-vous avec la nature. Demain vous renouerez avec cet environnement que vous avez longtemps snobé. Demain vous irez à la rencontre de vos souvenirs passés. Demain vous aurez à nouveau dix ans. Demain. Demain...

Perche en main, il vous attend à la Hautière pour remonter la chaussée. Se suivent chemins à charrette envahis d'herbes folles séchées, champs en jachère fleuris de tournesols datant de l'an dernier, levées ombragées où paissaient des chevaux au temps de votre enfance maintenant désertées, berges d'une douve faisant office de port pour les trois, quatre chalands amarrés. Machinalement, vous cherchez du regard le pieu en fer où était autrefois amarré celui de votre père. Est-ce celui-ci ? Ou bien celui- là ? Votre cerveau bloque. Ils se ressemblent tous... Et pourtant, combien de fois avez-vous cadenassé la chaîne qui le retenait prisonnier ? Le frottement de celle de votre voisin sur la coque en acier vous sort de vos pensées.

Installée sur le banc, face au canal qui se dessine au loin, vous remontez la douve au son des cliquetis de l'eau dus aux mouvements réguliers de la perche. Le chaland glisse sur l'eau maronâtre. Les hérons cendrés vous accompagnent un temps. Les rats gondin, dérangés dans leur domaine, rejoignent d'une nage assurée les galeries qu'ils ont creusées, transformant les berges en véritable gruyère. Deux canards colvert femelles s'envolent dans un fracas de bruissement d'ailes et de cac cac cac réprobateurs. Et vous voilà à la croisée des chemins. Celle de vos dix ans et du canal que vous venez d'emprunter. Dans l'angle, vous vous revoyez une gaule de bambou à la main, hameçonnée d'un bout de laine rouge pour attirer les grenouilles. L'hameçon n'est pas réglementaire mais autant vous aimiez manger les pattes de ces bestioles visqueuses, autant vous répugniez à les toucher. Il fallait donc qu'elles soient solidement prises pour que vous effectuiez les quelques pas qui vous séparaient de votre père préférant, lui, la pèche à la ligne. Quelques mètres plus loin, vous découvrez les piliers en bois vestiges de pècheries maintenant disparues, tout comme leurs propriétaires. Ces bouts de bois à moitié rongés restent les uniques témoins des parties de pèche au carrelet nocturnes où étaient ramassées par kilos anguilles et civelles. Il est vrai qu'à présent elle est réglementée, voire interdite. Alors à quoi bon garder une pècherie ? Poissons chat, gardons, boers, perches dorées, brochets, black bass. Ce canal en regorgeait. Avant. Vous tendez malgré tout un filet avant de continuer un peu plus loin, vers les petits murets, eux aussi vestiges d'un autre temps (1).

10h30, le temps de remonter, il sera midi vous prévient votre voisin tout en vous faisant remarquer les ondes devant le nez de l'embarcation. Un brochet. Il chasse ! vous informe-t-il. Oh la la, il ne pourrait pas être dans l'autre sens, le fumier ! maugrée-til. Alors que vous amorcez votre demi-tour, comme un pied de nez, il bondit une ou deux fois hors de l'eau. Pour attraper un moustique ? Le filet, lui, n'a pas bougé. Il n'y a rien diagnostique votre voisin. Tu vois ça comment ? questionnez-vous. Il n'est pas enfoncé. Ah ! Oui. Forcément... En le remontant vous avez tout de même la surprise d'une petite prise. Une brème vous apprend-t-on. La voir se débattre dans le fond de la barque vous donne un pincement au coeur. S'il n'en tenait qu'à vous, vous le remettriez à l'eau. Votre voisin vous regarde, la gauloise au coin des lèvres. Après réflexion, prend le pauvre poisson et doucement le remet à l'eau. Ca ne vaut pas le coup se justifie-t-il. Non, ça ne vaut pas le coup, effectivement. Par contre cette balade sur ces eaux reposantes, oui, assurément ! On remet ça quand ?!

(1) : les petits murets sont les piliers d'anciennes écluses. Ces écluse d'un autre temps n'étaient pas manoeuvrables par des portes mais par des madriers qui venaient s'empiler les uns sur les autres afin de réguler le débit de l'eau. Aujourd'hui, les goulottes taillées dans les pierres sont toujours visibles, seulement, non entretenus, les piliers subissent l'érosion du temps et menacent de s'écrouler et d'emporter avec eux le témoignage d'une régulation de l'eau différente de l'actuelle mise en place.

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